LA FÉDÉRATION BIODYNAMIQUE DEMETER INTERNATIONAL
La Fédération biodynamique Demeter international tire son nom de Demeter, déesse de l’agriculture et des moissons dans la mythologie grecque.
Selon les termes de cette Fédération, « l’agriculture est l’expression d’une rencontre active et formative entre l’humanité et le monde naturel ». Cet adage est l’un des principes de base d’un document de 162 pages, qui énonce des normes de production, de traitement et d’étiquetage juridiquement contraignantes dans le monde, auxquelles un produit alimentaire doit satisfaire pour pouvoir être certifié « biodynamique » ou pour que le logo Demeter soit apposé sur son emballage. Active dans 50 pays, elle compte 5 000 fermes, dont la certification est réévaluée par des organismes locaux de certification agréés qui viennent leur rendre visite chaque année.
Toujours d’après ses critères, « tous les agriculteurs et cultivateurs en biodynamie pratiquent les méthodes de production de l’agriculture biologique, avec laquelle la biodynamie partage des normes de certification très similaires. Leurs objectifs et leurs idéaux sont très proches, mais la biodynamie a des racines métaphysiques et spirituelles que le bio n’a pas... Si un agriculteur ne s’intéresse qu’au respect de certaines formalités, ou recherche uniquement un moyen de tirer un quelconque avantage économique, il lui est conseillé de pratiquer l’agriculture d’une autre manière... »
Au Royaume-Uni, la Biodynamic Association (BDA) est le seul organisme habilité à certifier les produits biodynamiques. Cette association fait partie des six organismes actifs actuellement autorisés par le ministère britannique de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales (DEFRA) à certifier les produits biologiques. Elle veille au respect des règlements européens [No 834/2007 & No 889/2008] relatifs aux produits biologiques ainsi qu’à la présentation de documents contrôlés par des organismes indépendants pouvant en attester. Au moment de choisir un organisme de certification pour notre whisky biologique non tourbé Bruichladdich, nous avons décidé de suivre les normes de production biologique de la Biodynamic Association, avec l’idée d’aller plus loin encore un jour en élaborant un whisky entièrement biodynamique.
L’ORGE BIODYNAMIQUE
À cette époque, sous la direction de Mark Reynier qui a maintenant rejoint Waterford Whisky, nous n’avons pas réussi à trouver une ferme qui cultive l’orge à malter de façon biodynamique en Écosse. C’est Demeter Royaume-Uni qui nous a mis en contact avec Richard Gantlett, de la ferme de Yatesbury House, et qui l’a encouragé à se faire certifier en lui promettant que nous serions là pour acheter sa production. Dix ans plus tard, nous avons réussi à lancer le premier whisky au monde à arborer le logo Demeter, baptisé The Biodynamic Project, à partir des stocks de nos entrepôts produits avec l’orge de Richard.
Pour reprendre les termes des normes de la Fédération biodynamique Demeter international, ce whisky est « un produit authentique (...) dont la composition et l’histoire de vie sont transparentes et visibles pour tous ceux qui le commercialisent et le consomment. (...) À chaque étape, la responsabilité envers l’humanité et l’environnement doivent être au premier plan ».
D’AUTRES INGRÉDIENTS BIOLOGIQUES ?
En dehors de l’orge, bien que la levure que nous utilisons ne soit pas biologique, sa présence dans le whisky final est minime (seuls quelques-uns de ses composants aromatiques les plus fins restent après distillation). Elle est donc acceptée. L’eau qui sert à la production ainsi que l’eau de source utilisée pour la mise en bouteille sont testées régulièrement et vérifiées pour y détecter la présence éventuelle de résidus non naturels.
Outre les matières premières, les organismes de certification s’intéressent aux procédés employés. Chaque année, la Biodynamic Association vient nous rendre visite, en coordination avec Lawrence Vellam, notre directeur de la qualité et de la conformité et Gordon MacDougall, notre directeur adjoint de la distillerie. Elle vérifie que l’ensemble de nos systèmes, de nos registres et de nos étiquetages satisfont à la réglementation et que nous pouvons conserver notre certification. Le maltage doit lui aussi être certifié indépendamment. Actuellement, Bairds ne malte d’orge biologique que pour nous et une autre distillerie.
Sachant que nous élaborons également des produits non biologiques sur les mêmes équipements, nous devons redoubler de vigilance pour éviter toute contamination croisée. Comme l’explique Lawrence, « tous les maillons de la chaîne doivent être biologiques, de bout en bout, si nous voulons pouvoir certifier le produit fini. »
En pratique, cela signifie éliminer tout résidu non biologique. Nous passons un aspirateur à l’intérieur de notre moulin. Toutes les zones de manutention des céréales qui ne sont pas directement accessibles sont « nettoyées » en y faisant passer de l’orge biologique. Nos cuves en bois (« washbacks ») et autres récipients de fermentation sont tous nettoyés un par un à la vapeur chaque semaine. Pour chaque type de spiritueux que nous élaborons, nous conservons séparément nos queues de distillation (issues des distillats précédents). Quand celles-ci sont remplacées par de nouvelles, nous lavons les conteneurs à l’eau chaude. Pour ne courir aucun risque, juste avant de passer d’une production conventionnelle à une production biologique, nous faisons tourner le moulin une dernière fois avec de l’orge biologique. Le lot de spiritueux qui sortira du moulin contiendra donc une petite partie d’orge biologique, même si celle-ci n’en portera jamais le nom.
UN WHISKY BIOLOGIQUE
À ce jour, tout notre whisky biologique a vieilli en ex-fûts de bourbon. Nous cherchons en effet à comprendre les arômes provenant de notre orge biologique, comparée à des orges cultivées différemment ou cultivées dans d’autres fermes biologiques, sans que le bois des fûts ne vienne interférer. À l’image de nos recherches sur l'orge Bere et sur l'orge d'Islay, cette démarche s’inscrit dans notre série d’explorations sur cette céréale.
Pour éviter tout mélange entre biologique et non biologique, nous avons décidé de faire vieillir nos productions biologiques uniquement en fûts de premier remplissage (y compris de chêne vierge), ou en fûts de deuxième ou de troisième remplissage, si ceux-ci ont précédemment contenu notre whisky biologique. Nous possédons cependant des stocks de whisky biologique vieillis dans d’autres types de fûts, de xérès et d’autres vins, que nous utilisons souvent dans nos cuvées de Classic Laddie. Celui-ci n’étant pas certifié biologique, c’est une prérogative que nous nous réservons, du moment qu’Adam la juge appropriée. Apprenez-en plus sur les recettes avec Classic Laddie.
LES TYPES DE FÛTS
Récemment, nous avons eu l’occasion d’avoir des échanges passionnants avec notre organisme de certification, concernant les différents types de fûts. « Les fûts ne sont pas considérés comme des ingrédients, mais comme des auxiliaires », explique Lawrence, « parce qu’ils ne font pas augmenter le volume de la production, ils en changent le caractère. Un fût contient majoritairement de l’alcool et de l’eau. Les composés aromatiques constituent moins de 1 %. Les phénols, par exemple, sont mesurés en parties par million. Ils ne représentent qu’une infime partie du pourcentage total. »
Nous avons envoyé pour analyse des échantillons représentatifs de distillats vieillis dans différents types de fûts à notre laboratoire partenaire, Tatlock and Thomson. Les résultats sont prometteurs. Ainsi, il est autorisé, pour les vins certifiés comme biologiques, d’ajouter en quantités précises des conservateurs tels que le dioxyde de soufre (E220) et le désulfite de potassium (E224). L’analyse visant à vérifier si ces sulfites pouvaient faire partie des composés chimiques libérés dans le whisky par le bois, au cours de la maturation en fûts de vin, ont indiqué que les quantités étaient inférieures aux niveaux détectables.
UNE AGRICULTURE RÉGÉNÉRATRICE
En fin de compte, toutes nos démarches en valent-elles la peine ? À en croire les Normes biologiques de la Biodynamic Association (BDA), « les agriculteurs biologiques jouent un double rôle dans la société : ils répondent à une demande des clients en produits biologiques, tout en œuvrant pour l’intérêt général, en contribuant à la protection de l’environnement naturel et à l’établissement d’une économie rurale durable ». Dans le secteur de l’alimentation, la discussion sur les sujets de la durabilité, du changement climatique, des sols et de la transparence a bien avancé. Alors pourquoi pas dans le secteur des boissons ?
Nous souhaitons faire partie d’une industrie qui génère de la valeur pour les cultivateurs soucieux d’accorder la priorité aux besoins des sols, à la séquestration du carbone dans la terre ou à la promotion de la biodiversité. Nous cherchons à faire progresser commercialement un système différent, basé sur une agriculture régénératrice validée officiellement et exhaustivement par les autorités de certification compétentes. En poursuivant ce type de politiques d’achat innovantes, nous sommes déjà sur la bonne voie.
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